Traduit de l'américain par Annick Le Goyat.
Existences cabossées, tragédies dérisoires des laissés-pour-compte de l'Amérique profonde... Premiers mots de la 4ème de couverture du livre qui donnent bien le ton du roman. Peu de personnages mais tous tiennent une place importante dans le récit.
Gordon, sorti de prison après vingt cinq ans d'incarcération. Difficile. La rencontre avec les autres ne se fait pas facilement, il y a la peur et le regard d'autrui qui vous enlève toute assurance naissante. La méfiance est là. Alors il est plus réconfortant de se blottir dans la maison laissée par le père défunt, de ne pas trop sortir, de se réfugier dans des habitudes un peu compulsives.
Dennis, le frère qui a réussi, chirurgien dentiste, marié, père de famille, une vie bien établie à première vue. Oui mais l'aventure amoureuse extra-conjugale le flatte, il en a besoin comme un édulcorant dans sa vie tranquille. Protectionniste vis-à-vis de son frère car il protège son statut social et professionnel.
Lisa, l'épouse de Dennis, la bonne ménagère américaine, gentille, avenante, pensant que son foyer est OK sans problème.
Delores, l'amie d'enfance de Gordon et amoureuse de lui. La fille sympa qui ne peut vivre qu'à travers les autres. Une sorte de SAMU affectif, dont on apprécie la venue mais l'éloignement aussi. Volubile, active qui cache ses complexes de silhouette un peu forte par sa gentillesse et son dévouement.
Jada. J'aurais eu envie de la prendre dans mes bras et de la câliner. Pauvre enfant. Une mère droguée utilisant sa fille pour dealer quand elle est en manque sinon elle s'absente sans se soucier des conséquences. Jada a souvent faim pour ne pas avoir à manger ni de quoi acheter de nourriture, abandonnée à son triste sort dont elle essaie de sortir au coup par coup. Pas un grain de méchanceté mais la vie est très dure avec elle.
Madame Jukas, la voisine âgée, un peu aigrie mais dans ce quartier de misère il faut bien se défendre comme on peut.
Ce qu'a vécu Gordon, je le ressens dans ces mots tirés du livre et qui traduisent les difficultés de la réinsertion
ça ne pouvait tomber plus mal : pas d'argent, pas de travail, pas d'ami. Il songea à Bernie Samuels, son voisin de cellule pendant les deux dernières années. Pour Bernie, qui avait passé autant de temps en prison qu'en liberté, la vie "dehors" était beaucoup trop compliquée. Factures à payer, enfants à élever, femmes à satisfaire, voiture à réparer. Retourner en prison était presque un soulagement. De même qu'on enferme les criminels pour protéger la société, dont les nuances subtiles sont impénétrables pour certains. Peut-être était-il l'un de ceux-là, songea-t-il en séchant la dernière boîte de conserve de Mme Jukas. Et si la liberté était le pire des châtiments ?
A bientôt
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